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Maurice RONET

...il va réaliser deux films et a trouvé la femme idéale!

Réalisé par Maurice Ronet pour le petit écran, Bartleby est main­tenant présenté sur les grands écrans des cinémas.

En 25 ans de carrière de co­médien, c' est seulement la deuxième expérience de réalisa­teur (si l'on excepte les courts métrages, dont Vers l'Ile des dra­gons qui complète le programme Bartleby) de cet acteur exigeant, cultivé, et qui, bien qu'aimant énormément son métier, ne peut se satisfaire d'être seulement in­terprète.

 

« — J'ai porté en moi Bartleby pendant 11 ans, raconte-t-il. Au­cun producteur n'en voulait. L'a­mitié de Marcel Jullian m'a per­mis de le réaliser pour Anten­ne 2. Je crois que c'est là un rôle intéressant de la télévision de favoriser des oeuvres hors de tout critère de rentabilité, être un banc d'essai. Si j'en juge par les réactions ayant suivi l'émis­sion télévisée, mon film est po­pulaire, et je pense qu'il peut gagner beaucoup à être projeté dans l'intimité des salles de ci­néma. »

Bartleby est un commis d'huis­sier pâle, effacé, mystérieux, dont on ne sait rien, ni d'où il vient, ni où il va, ni ce qu'il désire. Mais, refusant toutes les compromis­sions que la société lui impose, se murant dans l'immobilisme, il va perturber un monde trop orga­nisé, amener son patron à la ruine et même à la prison.

« — C'est, commente Ronet, l'histoire d'un homme simple, dé­nué de tout échange, ce qui, lorsqu'il s'introduit dans l'univers des gens « normaux », dérange, bouleverse, perturbe. Un person­nage qui ne pouvait que me fasci­ner, même s'il ne me ressemble pas tout à fait. Mais je souffre comme lui des maux de notre ci­vilisation, la difficulté de commu­niquer, l'hypocrisie, la médiocri­té, la démission.

        — N'avez-vous pas eu envie de le jouer?

— Quand j'ai pensé à adapter la nouvelle de Melville, je ne voyais que moi pour le rôle. Et depuis, il m'a tout le temps obsé­dé. Pour éliminer cette obsession, je faisais des essais avec d'au­tres comédiens et, naturellement, ils ne me plaisaient jamais puis­que, inconsciemment, je ne vou­lais que moi en Bartleby. Heu­reusement, le temps a passé, je n'ai plus eu l'âge, le physique, le moral. J'ai été libéré quand j'ai pu enfin accepter qu'un autre, Maxence Mailfort, jouerait ce per­sonnage.

Et personne ne m'a déçu, ni Michel Lonsdale, ni Maurice Biraud, ni Jacques Fontanelle, Hu­bert Deschamps ou Dominique Zardi auquel j'avais pensé dès le début. »

 

 

Tout en se défendant de vou­loir pratiquer un cinéma intellec­tuel, au contraire, Maurice Ronet avoue n'être pas attiré par le grand spectacle. On ne le verra pas de sitôt essayer de rivaliser avec Steven Spielberg ou en train de diriger un western.

« — Il ne faut pas forcer sa nature, j'ai envie de faire un ci­néma qui me ressemble. Or je crois au cinéma allusif, allégori­que, au cinéma d'angoisse, d'émo­tion, celui qui inquiète, qui inter­roge sans donner de réponse. Cette préoccupation, on peut la retrouver même dans mes repor­tages filmés. Ce qui m'intéresse, c'est ce qui se passe derrière les images. »

Une thèse de Céline

Si Melville est l'un des écri­vains de chevet de Maurice Ro­net, il en est un autre pour lequel il éprouve une égale admiration, Louis-Ferdinand Céline.

« — Je sais qu'il n'est pas fa­cile à transposer à l'écran. Et je ne prétends pas être celui qui réalisera ce Voyage au bout de la nuit dont l'adaptation a décou­ragé les plus grands réalisateurs, de Losey à Visconti. Mais je vais quand même aborder Céline à ma manière, encore une fois par le biais de la télévision, en souhai­tant que le film comme pour Bar­tleby passe ensuite dans les sal­les.

J'ai fait une adaptation de la thèse que Celine a présentée en 1922 à la faculté de médecine. Elle concernait un médecin dont la personnalité m'a parue remar­quable, Philippe Igance Semmer- weiss. C'est lui qui découvrit les principes d'hygiène permettant d'éviter la fièvre purpérale chez les femmes accouchées, en 1848. Mais il se heurta au scepticisme puis à la haine de ses proches et de ses confrères. Il était en avance sur son temps. Je veux montrer qu'une vérité, aussi évi­dente qu'elle soit, ne peut pas être dite si elle n'est pas dans son temps. Et je veux traiter de l'intolérance.

Céline m'aura été utile pour un autre de mes projets car c'est lui qui considérait comme un des plus grands auteurs contempo­rains Bernardt Helleman dont je compte porter à l'écran un roman datant de 1910 La mer, histoire d'un homme qui veut se retirer du mondé, histoire d'un amour et d'une amitié impossibles. »

 

Le goût étrange de l'échec

Maurice Ronet, malgré ses projets de mise en scène, n'en­tend pas abandonner son métier de comédien auquel il a consacré récemment un livre sous forme d'un dialogue avec Hervé Le Boterf.

« — C'est le métier de comé­dien qui a toujours été ma bouée de sauvetage en m'imposant des horaires, des exigences, des limi­tes. Sans lui, je serais peut-être devenu une épave.

—  Pourtant, vous n'êtes jamais devenu une vraie star comme De­lon ou Belmondo.

—  Heureusement, car un grand succès pourrait me détruire. J'ai à plusieurs reprises constaté que la réussite ne me convenait pas. J'ai abandonné la peinture parce que cela marchait trop bien. Si le hasard faisait qu'un de mes films me transforme en réalisa­teur vedette, j'aurais peur et cela m'empêcherait peut-être de con­tinuer.

Je crois que j'aime le goût étrange de l'échec.

—  En amour aussi?

—  Dans ce domaine aussi, j'ai fait de nombreuses tentatives sans succès. Mais au moins une, avec Anouk Aimée, il y a long­temps, fut très belle, trop belle pour durer. J'ai vécu des aven­tures sans illusions, prenant la fuite dès que cela me semblait devenir sérieux, j'ai rarement habité un appartement à moi, pré­férant vivre en hôtel. Mais j'ai eu aussi et j'ai toujours de bons amis, et je crois enfin avoir trouvé en Joséphine Chaplin la femme que j'ai longtemps cherchée, cel­le qui remet en question toutes mes théories, qui me bouscule avec tendresse, qui m'oblige à sortir de moi-même, à être géné­reux. Une réussite, je crois, mais celle-là ne me fait pas peur, car elle n'est pas une réussite com­merciale! »

RENE OUINSON

© Alibi № 116, 1980 


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