САЙТ ПОСВЯЩЁН БЛУЖДАЮЩЕМУ ОГОНЬКУ ФРАНЦУЗСКОГО КИНО МОРИСУ РОНЕ... 

Maurice Ronet :

"Je suis un célibataire fidèle a plusieurs femmes”

Par la phrase qui donne son titre au présent article, Maurice Ronet ne définit pas son personnage des "Femme” (qu'il tient avec Brigitte Bardot). Il se définit lui-même. Il n'a pas le style dragueur, mais c'est le type même de l'homme célibataire. C'est pourquoi tous les propos qu'il tient ici présentent un grand intérêt quant à la psychologie du célibataire de plus de quarante ans à notre époque.

Quarante-deux ans, vingt ans de cinéma, une cinquantaine de films, Maurice Ronet n'arrête pas. Il tourne en moyenne quatre films par an. Après "La Piscine” ce furent "Les Femmes” avec B.B.,  "La Modification” avec Sylva Koscina, "Qui?” avec Romy Schneider. Malgré son activité trépidante de comédien, il écrit des scénari et prépare, comme réalisateur, un film sur le "Dragon de Komodo” un reportage sur le mythe du dragon en Extrême-Orient. Cet animal fabuleux est un sorte de varan géant, qui atteint parfois huit mètres de long et pèse cinq cents kilos. Une école assez sérieuse prétend que ces animaux auraient chassé de la surface terrestre les dynosaures, diplodocus, brontosaures et seraient ainsi les seuls représentants de la faune préhistorique.

La difficulté de vivre en célibataire à notre epoque

— Depuis "Le Voleur du Tibidabo”, lui ai-je demandé, vous n'avez pas refait de mise en scène. Vous qui êtes à la fois acteur, réalisateur, quels sont vos rapports avec vos réalisateurs successifs?

— Nous marchons la main dans la main. Au début d'un film, je lis le script et je prends des notes. Puis je les communique au metteur en scène, afin de trouver un moyen d'entente entre lui et moi. Une fois que nous nous sommes mis d'accord, il n'est plus question de faire une critique. Plus que d'être acteur, ce qui m'intéresse, c'est d'être cinéaste.

— Parlez-moi de vos rapports avec vos partenaires. Par exemple, lorsque vous avez tenu Brigitte Bardot dans vos bras pour "Les Femmes” qu'avez-vous ressenti?

— J'ai eu beaucoup de plaisir à l'avoir comme partenaire car c'était la première fois, et pourtant je la connais bien. C'est une fille que j'aime beaucoup, qui a de plus en plus de talent.

— Et cependant, le film n'a pas eu le succès escompté?

— Cela n'enlève rien à ses qualités, ni au film ni à Brigitte. Ce film a représenté une chose très importante, une étape dans ma carrière, car je le considère comme la comédie-type. Dans la comédie, cela peut sembler un paradoxe, il s'agit de présenter des choses sérieuses et aussi bien Aurel que Jacques Laurent l'ont parfaitement compris. On y parlait en effet de la difficulté de vivre en célibataire à notre époque, on y parlait de l'échec, de la folie, du mensonge, du séducteur, qui n'est autre qu'une victime. Le ton un peu impertinent des auteurs avait heurté le public et la critique. Cela a été pour moi une grande déception.

 

De Brigitte Bardot à Romy Schneider

— Et les contacts avec Brigitte?

— Merveilleux.

— Vous n'avez pas eu le trac?

— Pas du tout.  Les grandes vedettes ne donnent jamais le trac. Au contraire, elles vous stimulent. C'est avec les mauvais acteurs qu'on a peur.

— Vous n'êtes pas tombé amoureux d'elle?

— Absolument pas.

— Et Romy Schneider, que vous avez dans  "La Piscine” et dans  "Qui?”?

— J’ai connu Romy en 1960, quand je tournais  "Plein Soleil” et qu'elle était venue en vacances à Ischia, pour y rejoindre Alain Delon. C'était une petite fille à l'époque et j'ai retrouvé une femme. Elle a su passer le cap et se débarrasser d’un passé de cinéma assez difficile. C'est très dur de partir de personnages comme ceux auxquels elle était habituée et d'avoir à chercher sa véritable personnalité. Aujourd'hui, elle l'a trouvée.

Le métier, une manière de faire l'amour

— Quel est pour vous, l'essentiel de la vie? Si vous voulez, où est le bonheur?

— C'est un sujet dont on pourrait parler pendant des heures. Je crois que c'est aimer dans toutes les acceptions du terme. Etre heureux, c'est bien difficile a definer. Peut-être le moment où je l'ai été le plus, c'est lorsque j ai fait mon premier film comme réalisateur. Pour moi, le bonheur réside plutôt dans la difficulté et dans l'effort que dans la facilité. L'exaltation des débuts, que ce soit au cinéma, en littérature ou en peinture, voilà pour moi le bonheur. Tenez, mes premiers pas de jeune peintre m'ont laissé un merveilleux souvenir.

— Aimez-vous le travail?

— Oui, et je dois beaucoup au travail. Combien de bêtises aurais-je faites si je ne m'étais astreint à une certaine discipline. A un moment donné, la conscience professionnelle m'a empêché de sombrer, de me laisser aller. C’est un métier qui exige d'ailleurs de la vigilance, de la ténacité et beaucoup de philosophie.

— Le métier compte-t-il davantage que l'amour?

— Pour moi, c'est une manière, je ne dis pas de faire l'amour, mais de me livrer, de me donner.

Pas le scénario ou la fille: le scénario et la fille

— Supposons que vous hésitiez entre deux programmes, un scénario à lire d’urgence dans la soirée ou sortir avec une belle fille?

— Je m'arrange pour faire les deux, mais je lis d'abord le scénario et je sors ensuite avec la fille. Maintenant s'il n'y a pas un caractère d'urgence, je donne la priorité à la belle fille et je remets au lendemain la lecture du scenario.

— Etes-vous croyant?

— Malheureusement, je suis athée, je dis "malheureusement” parce que la religion apporte un appui moral. On a dit que le christianisme était une réaction de peur. Je crois que c'est le contraire. C'est parce que les hommes ont peur qu'ils ont eu l’idée de Dieu. Pendant des années, on a donne aux individus de bonnes raisons de mourir avec un certain ideal. On leur a dit que la religion ne les empêcherait pas de mourir, mais qu'elle leur permettrait de mourir un peu plus facilement.

— Personnellement craignez-vous la mort?

— Celle de mes amis, oui. La mienne, pas du tout. Si vous voulez, j'ai peur de mal vivre.

Guerre à la guerre, ç est encore la guerre

— Les notions de patrie, d'armee, de service militaire sont-elles importantes pour vous?

— On n'a jamais autant parlé de la paix que depuis que le monde est à feu et à sang, la guerre est évidemment une chose qu’il faut éviter à tout prix, qu'il faut combatter, mais guerre à la guerre, c'est encore la guerre. Cest pourquoi I’on ne peut concevoir l'idée d'une paix sans une morale profonde. Ni sans croyance. Quant aux notions d'armée, elles sont dépassées. Apres la guerre 39-45 les peuples se sont rendu compte de ce que serait un nouveau conflit mondial et malgré les formidables moyens de destruction dont ils disposent ils ne peuvent les employer, car ils savent que ce serait la fin de la civilisation.

— La science vous passionne-t-elle?

— La Lune, c'est sensationnel, bien sûr, mais cela obéit a des notions qu'on a quand on est gosse. Lorsque nous voyons les trois cosmonautes mettre le pied sur notre satellite, nous sommes concernés, mais le spectacle me parait dépasser la signification de la réalité. Pourquoi, avec les prgrès accomplis, ne sommes-nous pas déjà sur Mars?

— On se demande aussi pourquoi l’homme, qui foule le sol de la Lune et qui s'apprête à voler vers Mars, n'a pas encore trouvé le remède de certaines maladies, comme le cancer?

— On fait des progrès dans tous les domaines, mais j'imagine que le domaine des sciences médicales est aussi vaste que le cosmos. Il y a encore tant de choses à découvrir.

Vivre en sentant qu'on risque quelque chose

— La vie intellectuelle?

— Elle fait partie de toutes mes actions.  Je lis le plus possible, en moyenne un livre tous les trois jours, y compris les documents ou les scénari qu'on me propose pour des films. Je suis assez au courant du courant littéraire et si, par exemple, j'ai envie de faire ce film sur le Dragon, c'est qu'à une certaine époque de ma vie, je me suis penché sur les religions comparées. Il y a dans tout homme, non pas un cochon, mais un aventurier qui sommeille.

— Le plaisir, qu'est-ce que c'est pour vous?

— C'est tout ce que je viens de vous dire.

— Mais le plaisir profane?

— J’aime  vivre un peu dangereusement.  Sentir que je risque peut-être quelque chose. l'ai connu une période où je vivais de nuit et de jour. Mais maintenant ce n'est plus possible.

Le regret de ne pas avoir d'enfant

— Avez-vous le temps d'avoir une vie amoureuse? Parlons des femmes.

— Encore un énorme sujet. Vous m'épuisez.  Sur la question des femmes, je suis largement pour et c'est pourquoi je ne me suis pas encore fixé.

— Pas de projets matrimoniaux?

— Non. J’ai été marié une fois et c'est bien ainsi. Il y a un moment pour se marier et un moment où l’on choisit une existence qui n'est pas tout-à-fait sédentaire, tout en ayant la nostalgie d’une vie plus régulière.

— Pourriez-vous  vivre avec la même femme, le restant de vos jours?

— Certainement.  J'aime bien mon entérieur, j’aime recevoir.

— Vous n'êtes pas de caractère changeant?

— Je suis plutôt fidèle, disons fidèle a plusieurs femmes.

— Le mariage?

— Je ne suis pas contre.

— Mais pas pour non plus?

— Il n'y a qu'une chose, voyez-vous. Que je regrette, c'est de ne pas avoir d’enfant. Quand j'étais jeune, je n'en voulais pas, parce que j'avais la vie devant moi. Et maintenant que je ne suis plus jeune, je trouve que c'est trop tard, je ne voudrais pas que mon fils en souffre. Il faut avoir des enfants avant trente ans. Avoir un gosse é quarante ans, il y a vraiment trop de différence. D’ailleurs, cela est purement théorique et si je trouve un jour la mére de mes enfants, eh bien, j'aurai des enfants.

L'érotisme est dans les rapports de la femme nue et des hommes

— Que pensez-vous de l’érotisme qui sévit actuellement dans tous les domaines?

— Ce n'est plus de lérotisme, c'est souvent de la pornographie. Nous sommes à une époque où les gens se déshabillent énormément. Quand ils n'auront plus envie de le faire, ils reviendront à un costume d'autant plus décent qu'ils étaient indécents jusque là. Quand on tend à montrer trop, ou tout, on ne montre plus rien et on fait de la pornographie. Quand on ne fait que suggérer, c'est de l’érotisme. Dans le domaine du cinéma, il n'y a rien de moins erotique, a mon avis, que les films scandinaves. Maintenant s'il faut vider cet abcès, qu'on se dépêche de le crever, mais qu'on ne vienne pas me parler d'érotisme. Montrer une femme nue à l'écran, je suis désolé, mais ça n'a rien d'erotique!

— Vous avez tourné des scènes d'amour assez poussées?

— Pas tellement. La seule que j'ai tournée que je juge la plus suggestive est celle des "Femmes”, au moment où un type demande à une jeune femme (Anny Duperrey) de se dèshabiller devant des dessinateurs. Ce qui compte, ce n'est pas la nudité de la femme, ce sont les rapports qui s'établissent entre ces personnages, c'est le folie de l'homme, c'est qu'elle se trouve nue devant des gens qui la dessinent.

Il cherche deux filles de 18 ans…

   Maurice Ronet, outre son projet du "Dragon de Komodo” en a trois autres, très différents. D'abord un long-métrage sur une ruche d’abeilles, qui serait à la fois un film de fiction et d'épouvante, car la société des abeilles est parfaitement organisée, mais offre des aspects terrifiants. Ensuite il tournera comme acteur, un film de Vittorio Caprioli, à Rome, "La Vie secrète de Madame Royale”, qui n'est pas du tout un film historique, mais qui se déroule dans le milieu des travestis. Il y fait un commissaire de police. Il lui faut comme partenaire une fille de 18 ans, qu'il n'a pas encore trouvée. Enfin, "Un peu, beaucoup, passionnément”, un film de Robert Enrico. Pour ce dernier film, il lui faut une autre fille de 18 ans. Il en cherche donc deux. Deux jeunes talents à découvrir.

Jacques BAROCHE

© Ciné-Revue № 17, 1970



Перейти к другим статьям

Cinémonde № 1231, 1958 / Ciné-Revue № 35, 1968 / Ciné-Revue № 17, 1970 / Jours de France № 885, 1971 / Le soir illustré № 2042, 1971 / Ciné-Revue № 41, 1972 / Ciné-Revue № 10, 1975 / Ciné-Revue № 10, 1979 / Alibi № 116, 1980 / Ciné-Revue № 18, 1982 

 



Сайт создан в апреле 2007 года с ознакомительной целью. Права на статьи и фото принадлежат их авторам.