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Maurice Ronet

48 ans et toujours un immense succès auprès des femmes...

 

Maurice Ronet habite au deuxième étage d’un immeuble cossu du septième arrondissement de Paris, tout près de l'Ecole Militaire. Son appartement est celui d'un vieux gar­çon. Arrangé n'importe comment. Encombré de boîtes de films, de livres, de vêtements jetés pêle-mêle. Aux murs, pas une seule toile de maître, rien... 

—     Pourquoi un appartement pareil alors que vous travaillez sans arrêt ? Cet appartement ne ressemble en rien à celui d'une vedette…

—   Je ne sais pas très bien ce que peut être l'appartement d'une vedette. Tout ce que je sais, c'est qu'effectivement ce n'est pas un appartement très habité. J'ai un peu l'impression d'habiter dans une malle-armoire !

—   Quel âge avez-vous ? Vous faites jeune…

—   Et pourtant j'ai 48 ans cette année...

—    Combien d'années de mé­tier ?

—   A peu près vingt ans. Je dis à peu près parce que durant ce temps-là j'ai eu quelques interrup­tions durant lesquelles j'ai passé mon temps à écrire, à peindre. J'étais très jeune lorsque j'ai débu­té. C'était dans «Rendez-vous de juillet», de Jacques Becker. J'ai ar­rêté pendant cinq ans, pour ne re­commencer que vers 1955.

—   1974 - 1975 aura été une an­née intéressante pour vous puis­que vous avez une bonne demi- douzaine de films à votre actif…

—   En effet juste une demi-dou­zaine jusqu'à ce jour : 1. «Marseille contrat» avec Anthony Quinn, James Mason, Catherine Rouvel, Michael Caine ; 2. «Le cri du cœur», avec Stéphane Audran ; 3. «La Messe dorée», avec Lucia Bose et Beni Montrésor ; 4. «Pourquoi se suicident-ils», en Ita­lie (ce n'est pas tout à fait le titre définitif) avec Michaela Pignatelli ; 5. «Seul le vent connaît la répon­se», avec Marthe Keller et en ce moment «Jackpot», avec Richard Burton, Charlotte Rampling, James Coburn. Il serait temps que je pense un jeu à me reposer. Sauf si on m'en propose un septième qui soit intéressant !

—   Vous me parlez de Marthe Keller dans «Seul le vent connaît la réponse». J'ai lu dans certains journaux que vous étiez tombés amoureux l'un de l'autre. Avez- vous déjà été marié ? Ces bruits sont-ils fondés ?

—   J'ai été marié, bizarrement d'ailleurs puisque, vu de l'extérieur, il paraît que nous n'étions pas faits pour vivre ensemble. Pourtant nous nous entendions très bien Maria Pacôme et moi. En 1953 - 54 !

Quant aux bruits qui courent sur moi et Marthe Keller, je ne vous dirai rien. Croyez ce que vous voulez. Je ne confirme pas. Je laisse les choses se faire. Et surtout se dire! Ça suffit…

—     Comment se fait-il que vous ne vous soyez pas remarié depuis, avec Marthe Keller ou une autre, peu m'importe ?

—   Parce que je crois que l'in­stabilité conserve mieux…

—    En dehors des tournages dont vous êtes la vedette, que peut bien faire un homme comme vous ?

—  Je n'ai pas tellement le temps de me reposer parce que je tra­vaille tout le temps. J'en suis à mon quatrième scénario. Je travail­ le la plupart du temps seul. J'ai une maison de production de télévis­ion «TCV» qui est à moi et dont je m'occupe beaucoup. Ce boulot m'entraîne souvent aux quatre coins du monde. J'ai bien une maison dans le Vaucluse mais même là-bas, seul, j'écris. Donc, vous voyez, pas le temps de flâner et de perdre mon temps, ce dont j'ai horreur. Je ne conçois pas la solitude réelle et l'inaction totale. Et je ne considère pas que ce que je fais soit un véritable métier. Plu­tôt un violon d'lngres_

«MON PERCEPTEUR S'INTERESSE PLUS A MON ARGENT QUE MOI !»

—     Vous gagnez beaucoup d'argent ?

—  Oui et je ne sais pas ce qu’il deviant. Je ne possède pratique­ment jamais d'argent sur moi. Il me file entre les doigts. Je sais que ce n'est pas sérieux mais c'est com­me ça. Je suis incapable d'épar­gner. Je ne me préoccupe pas de l'argent que je gagne. Je laisse ce soin à mon percepteur qui, mani­festement s'y interesse beaucoup plus que moi !

—  Lorsque vous tournez avez- vous des exigences ?

—  Aucune… Au contraire, je fais tout pour bien m'entendre avec le metteur en scène et faire exacte­ment ce qu'il attend de moi. Même si, parfois, ça ne correspond pas à ce que je ressens. Sur un plateau, c'est le metteur en scène qui est seul maître après Dieu…

—  Ne vous est-il pas arrivé de ne vraiment pas vous entendre avec un metteur en scène ? A ce moment-là, quelles sont vos ré­actions ?

—  En effet ça m'est arrivé deux fois. Ce fut tragique parce qu'alors le métier devient un véritable cal­vaire pour moi…

—   Peut-on dire lesquels ?

—  Surtout pas. Ils se reconnaî­tront bien. Il s'agit d'un film relati­vement récent et l'autre est un peu plus ancien. A moins que ces deux metteurs en scène pensent que je suis comme ça avec tout le mon­de. S'ils pensent ça, ils se trom­pent. Je peux me permettre de leur dire.

— Que représente pour vous le fait d'être un comédien comme les autres sur un plateau mais de sa­voir que le film repose quand même un peu sur vos épaules?

—  Je pense qu'être un acteur en vue est une bonne chose. Pour que tout soit parfait il faut qu'il existe entre lui et son metteur en scène, une sorte de mariage, une entente, une communion parfaite au moment où l'on dit «moteur». Je ne crois pas — même si les caractères sont différents — qu'un film soit réalisable si l'acteur et le metteur en scène ne mar­chent pas la main dans la main, du moins durant le tournage. Le ci­néma est un travail d'équipe. Il ne faudrait jamais que les metteurs en scène et les comédiens l'ou­blient. Ce qu'ils font malheureu­sement un peu trop souvent.

 

«JE PREFERE TOURNER N'IMPORTE QUOI PLUTOT QUE DE NE RIEN FAIRE…»

—  Etes-vous satisfait de votre carrière ? Se déroule-t-elle com­me vous l'escomptiez?

— Je ne pense pas qu'un acteur puisse être juge et partie pour par­ler de sa carrière. Ce que je peux dire, c'est que ma carrière s'est déroulée comme je voulais qu'elle se déroule dans la mesure où j'ai toujours fait ce que je voulais faire. J'ai toujours pensé, à tort ou à rai­son, qu'il valait mieux tourner que de ne rien faire. Ce qui m'a parfois entraîné dans certains films pas toujours très bons. Il m'est arrivé d'être dans le creux de la vague aussi bien dans ma vie que dans mon métier. Je préférais alors tourner certaines choses, qu'on m'a reprochées depuis, plutôt que de rester sans rien faire.

—    Comment expliquez-vous le succès d'un film ou les bides qu'ont donnés certaines produc­tions où jouaient d'excellents ac­teurs comme vous par exemple ?

—    Je crois que c'est une ques­tion d'opportunité. De moment. De temps, de mode, de hazard.

—    L'érotisme au cinéma ?

—    Je ne crois pas à l'érotisme. Quant à cette fameuse guerre existant entre le porno et l'érotis­me, elle me fait bien rire mais elle existe malheureusement. Je crois que le porno est ce qui se montre et l'érotisme ce que l'on suggère.

Pour moi, le cinéma est un mode d'expression allusif.

Mon metteur en scène préféré est Fellini. Pour moi, il est arrivé de par son inspiration et sa formida­ble connaissance du métier à montrer les choses, son émotion, sa vision des choses. Les autres, ceux qui le copient me font l'im­pression d'être passés loin à côté. La pornographie intellectuelle sa­tisfait ceux que la pornographie suédoise indispose. Exemple : «Le dernier tango à Paris».

—    Accepteriez-vous de tourner dans un film à immense succès comme «Le dernier tango» ou «Emmanuelle» ?

—    Absolument pas, ce n'est pas mon métier ! N'en déplaise à mon­sieur Marlon Brando. Pour être tout à fait franc, je préfère faire ces choses sans témoin, sans ca­méra, pour ne pas contrôler mes réactions, ce que, malheureuse­ment les acteurs de ce style de films sont obligés de faire. Je ne suis pas contre les gens qui font ça. Ça ne me concerne pas, c'est tout…

«LE CELIBAT ? UN TIC…»

—    Si vous aviez à produire un jour un film, histoire de gagner beaucoup d'argent dont le sujet soit «éro-porno» quelle serait votre réaction ? L'argent ainsi amassé devant vous permettre de produire ensuite un vrai, grand et beau film auquel vous croiriez?

—    Ça demande réflexion parce que je ne me suis jamais posé cette question. Pour vous ré­pondre comme ça, sur le coup, je ne crois pas que j'utiliserais cet ar­tifice…

—     Etes-vous pudique?

—    Oui. J'estime qu’ll y a des choses dont on ne doit pas parler et encore moins montrer.

—     Comment organisez-vous votre vie? Par rapport à votre «métier» ou au contraire comme n'importe qui?

—   Ce n'est pas de ma faute si je suis entouré d'une sorte de mys­tère. Je ne vis pas par rapport au métier. Je ne sors que très peu dans les endroits à la mode. Je ne cherche pas que les journaux s'emparent de ma vie privée pour faire de moi une bête à couverture de magazine. Je ne me cache pas non plus outre mesure. Je suis comme tout le monde. Du moins, je veux le croire.

—   Vous avez tourné avec de très belles actrices. N'avez-vous jamais eu le coup de foudre pour l'une d'entre elles ne serait-ce même que le temps du tournage ?

—    Non, pourquoi voulez-vous que j'agisse comme ça ? Pour faire parler de moi dans certains jour­naux ? Ça ne m'intéresse pas outre mesure. Je comprends la curiosité des gens qui veulent mieux con­naître certains acteurs qu'ils ai­ment bien. Je ne suis pas contre mais je n'ai jamais provoqué cette curiosité.

—   Alors pourquoi restez-vous célibataire ?

—  Tout simplement parce que c'est une sorte de tic, pas une drogue, mais bien un tic, une manie.

Plus je vais dans la vie, plus je deviens exigeant et plus je de­viens exigeant moins j'ai de chance de rencontrer une per­sonne qui convienne vraiment à mon caractère. J'aime la liberté que m'apporte le celibate. Partir où et quand j'en ai envie, c'est mer­veilleux. Ne pas avoir de comptes à rendre est encore plus mer­veilleux !

—   Accepteriez-vous de perdre cette indépendance pour une jolie femme ?

—    Pourquoi pas ? Je ne suis quand même pas enchaîné au cé­libat au point de perdre l'envie de vivre avec quelqu'un de bien, qui partage mes goûts et mes envies…

«J'ADORE BRIGITTE BARDOT»

—   Quelle est l'actrice qui vous a touché le plus et dont vous gar­dez le meilleur souvenir ?

—    Sans aucun doute Brigitte Bardot. J'ai tourné plusieurs films avec elle. Elle est tout bonnement merveilleuse. C'est une fille que j'adore. Et une bonne comédienne malgré tout ce qu'on peut dire sur sa manière de jouer. Brigitte a embrayé effectivement sur une toute autre carrière. Jamais je ne l'ai trouvée aussi belle aussi bien que dans «Don Juan», le film ayant beau être ce qu'il est. On aime ou on n'aime pas, c'est un autre problème.

On dit qu'elle n'intéresse plus les producteurs et les metteurs en scène, ce qui n'est pas tout à fait juste. Disons plus les mêmes qu'à l'époque où elle pouvait jouer les gamines. Qu'on lui donne un vrai rôle de femme et je suis certain qu'on reparlerait d'une nouvelle Brigitte.

Elle est très intelligente. Elle re­garde trop les choses en face pour ne pas voir et sentir le temps passer sans rien faire. Comme tous les acteurs, elle est arrivée à un tournant. Telle que je la con­nais, elle trouvera bien un rôle qui la remette à sa place…

Je ne me fais aucun souci pour elle. Elle a toujours été lucide à un point tel que j'en étais interlo­qué. Elle a aussi une telle person­nalité que rien ne peut entamer son caractère. Il n'y a pas de miracle : Brigitte est arrivée à être ce qu'elle est uniquement parce qu'elle a des qualités et beaucoup de cran. Sans cela, il y a bien long­temps qu'elle n'aurait plus été «la» Bardot. On a beau dire et beau faire, même dans ce métier où il est si facile de briller l’espace d’un film, il n'y a aucun doute que si Brigitte tient depuis si longtemps, c'est qu'elle a les qualités requises pour exister.

—   Etes-vous reconnu dans la rue ? Avez-vous du succès auprès des femmes ?

—   Oui, je suis reconnu. C’est agréable. Du succès auprès des femmes? Oui, sans aucun doute si j'en juge par ma vie de chaque jour. C'est encore plus agréable…

—   Quel est votre caractère?

—  Mon caractère est bon d’une maniére generale. Ce qui ne m'empêche pas de me mettre quelquefois très en colère, de m'emporter jusqu'a être violent aussi bien dans mes propos et quelques fois, mais rarement, dans mes gestes.

—    Comment votre vie esl-elle organisée?

—    Mal parce qu eie dépend entièrement du travail. Je dis ça mais si je devais rester inactif, je crois que je deviendrais fou!

—     Les voitures ? Les artifices de vedettes ?

—    C’est fini. Au début, je consi­dérais tout ça comme des jouets. Maintenant, je suis un grand garcon. Je suis devenu sérieux.

—    L’amitié?

—   C’est comme l’amour: on ne peut vivre sans…

(Propos recueillis par Roger A. HOUZE)

© Ciné-Revue № 10, 1975


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